HISTOIRE DE LA MEDECINE ESTHETIQUE
"Une Histoire de la Médecine Morphologique et Anti-âge"
Des papyrus d’Ebers aux lasers, comblements et toxine botulique
Dr Isabelle PAUL-GUENOUN © 2008

INTRODUCTION

 

          « On ne connaît bien une science que si on en connaît l’histoire » Auguste Comte

   Le but de ce travail, est de retrouver dans l’histoire des hommes et de leurs médecines, les fondements des principales techniques médicales encadrées depuis 2007 par la Médecine Morphologique et Anti- Age : les techniques de la Médecine Esthétique validées en 2008 pour le traitement de la pilosité, et des conséquences morphologiques du vieillissement. J’ai exclu volontairement du cadre de cette étude  les autres techniques « morphologiques » traitant de la silhouette et la partie holistique de la médecine morphologique et anti- âge traitant de la prévention du vieillissement, bien que cet aspect soit, comme nous le verrons, omniprésent dans les préoccupations de nos ancêtres.

  Il s’agit d’un travail d’épistémologie, (histoire des sciences) et de recherche historique sur les pratiques de la  médecine occidentale, de l’antiquité à nos jours.

  Le choix de ce sujet, a été influencé par :

-  la rareté des travaux de synthèses sur cette nouvelle branche de la médecine,
-  ma formation et l’intérêt  personnel que je porte depuis l'adolescence à tout ce qui touche à l’histoire, l’histoire de l’art, les origines de la médecine, « l’esthétisme », le vieillissement cutané.(1)
-  un triple constat : la persistance dans toutes les civilisations et à travers le temps, de la préoccupation des humains de leur "apparence" et surtout du visage; image première que l'on offre aux "autres" et surtout à soi-même !; l’effacement des rides, (marques du vieillissement), la lutte contre  les poils (symbole d’impureté, d’animalité), la préservation d'un "teint" frais.
   les actes esthétiques les plus pratiquées  en 2008 (annexe 2) sont : le laser, les injections de comblement, la toxine botulique qui répondent à ces trois demandes.
  Ces trois techniques sont validées, enseignées et encadrées de façon éthique par le diplôme de médecine et anti- âge, reconnu en 2007.

  Les moyens empruntés par cette étude sont : la recherche dans les écrits l’Histoire, l’Art, l’Histoire de la médecine, de ses techniques et de leur validation progressive.                    

  L’intérêt je l’espère sera double : "déstabilisateur et enrichissant", formule que j'emprunte à mes confrères les Dr Grégoire Moutel et Rémy Belhomme(2) du laboratoire d’éthique médicale, de droit de la santé et de santé publique de la faculté de médecine de Necker :

  - déstabilisateur : ce mode de recherche permet de mettre en évidence que le progrès n’est pas l’accumulation de savoirs, mais passe aussi parfois par une réfutation de données antérieurs acquises pour vraies, modification de direction des recherches engagées  dans des voies secondaire stériles voire dangereuse, nous permettant de rester modeste et critique ;

   -enrichissant : il  donne des repères, permet de maîtriser mieux le temps et  le rapport au passé, favorise le rapport au futur; car, même si l’histoire n’est pas un éternel  recommencement du fait de la singularité de chaque époque, les analogies  ne permettent  pas des corrélations directes, mais sont des outils de réflexion.

  La question à laquelle  on tentera de répondre est simple : par quel chemin sont parvenues ces techniques ? Et nous suivrons la chronologie de leur évolution.

        

I -  PREHISTOIRE - PROTOHISTOIRE
             

 Pendant cette immense période qui dura deux millions  d’années, (la préhistoire: paléolithique , mésolithique , néolithique et la protohistoire dans sa définition non chronologique  définie comme l’ âge des métaux, avant l’apparition de l’écriture en Europe), les sorciers étaient les premiers médecins guérisseurs. L’âge d’or où l’homme ne connaissait pas la maladie, semble n’avoir jamais existé.

 1.1  LES SOURCES DE DOCUMENTS

  Rares au paléolithique inférieur,  elles deviennent de plus en plus riches au paléolithique moyen puis  au paléolithique  supérieur,  l’homme des cavernes nomade, prédateur, chasseur, cueilleur, devenant sédentaire et agriculteur.
   Les ossements : étudiés par  la paléontologie (l’étude des restes  fossiles d’être vivants) et la  paléo-pathologie, (dans un but médical) sur des os, des crânes isolés puis des squelettes complets issus de sépultures  lorsque  l’homme a commencé à enterrer ses morts soit à partir du paléolithique moyen.
  Les instruments, outils de silex, pots, pinces, retrouvés dans les sépultures et habitations
  Les représentations : qui apparaissent  au cours du paléolithique supérieur (-30 000 ans) avec  les premières représentations graphiques, surtout animales et parfois humaines : Venus de Lespugue

 1 .2  LES PREOCCUPATIONS DE SANTE DES HOMMES DE LA PREHISTOIRE

Les études montrent qu’ils souffraient de nombreux maux et que les populations néolithiques et protohistoriques savaient guérir certaines affections, (1)  En  fait seules les affections ayant touché les os sont retrouvées, puisqu’il ne reste rien des parties molles ; méningiomes, entorses, luxations de hanche, rhumatismes, écrasements, blessures de guerre et de chasse, tuberculose, et syphilis sont le lot des hommes de la préhistoire. L’ étude des ossements et des habitats permet  aussi de déduire que  la vie moyenne des néanderthaliens ne dépassait pas 25 ans (2), le régime alimentaire d’abord cru puis cuit, ne les prédisposait pas aux caries, mais l'hygiène était rudimentaire, les déchets alimentaires déposés à l’entrée de abris

 1.3  LES SORCIERS GUERISSEURS

La médecine était le fait  de sorciers guérisseurs. On suppose  que les dons d’observation de l’homme préhistorique et sa vie en contact avec la nature, lui ont permi de sélectionner des plantes favorables à la guérison ; la découverte, au sein d’habitats ou de sépultures, de restes de pollen d’espèces végétales à propriétés thérapeutiques le confirme. L’utilisation donguents à base de plantes pour les cicatrisations (3) semblait être déjà connue ainsi que l’utilisation des propriétés thérapeutiques de l’argile et des ocres. L’argile était utilisée pour son pouvoir apaisant et cicatrisant (4) et les parois des tombes  étaient enduites d’ocre pour préserver la dépouille de la putréfaction.
D’autres traitements comportaient l’utilisation de purgatifs, de laxatifs, d’émétiques provoquant des vomissements et des lavements(5). On note déjà l’utilisation d’extraits de plantes aux propriétés stimulantes et narcotiques et de la digitaline, stimulant cardiaque extrait de la digitale.

  1.4  LES BABUTIEMENTS D’UN ART CHIRURGICAL

La connaissance élémentaire de l'anatomie animale issue des "dissections utilitaires" (découpe du gibier, prélèvement des peaux, de certains os, des tendons, des intestins) est ancienne. En revanche il n’existe pas de traces de réduction de fractures avant le néolithique, elles étaient seulement consolidées. 
Les  premieres tentatives de chirurgie osseuse sont retrouvés plus tard grâce aux documents plus nombreux de l’age du bronze ; il s’agit surtout de réduction des fractures, pose d’atelles,  réduction de luxations et, surtout, un très grand nombre de trépanations . Leur signification ne fait cependant  pas l’unanimité; s’agissait il d’actes de chirurgie réparatrice, de lutte contre les mauvais esprits, ou encore de pratiques rituelles ? (5bis). On pense qu'elles étaient pratiquées dans le cas d’épilepsie, de migraine, d’hydrocéphalie. L’examen des crânes montre souvent une nette cicatrisation, prouvant que les opérations étaient réussies et que le patient avait survécu, et confirme l’existence de drogues végétales capable d’endormir ou d’atténuer la douleur ; certains crânes portant deux trépanations; celle post mortem semble correspondre au début d’une vraie  chirurgie expérimentale .

 Photo : Évidence d'une intervention neurochirurgicale de l'époque préhistorique.(une pré mortem, cicatrisée, l’autre post mortem) Ce crâne humain date de plus de 7000 ans.

 

  1.5 PREMIERES PREOCCUPATIONS ESTHETIQUES : L’EPILATION

Les corps, sur les premières représentations, paraissent lisses, les premièrs outils ayant pu servir à l’épilation seront retrouvés à la protohistoire (âge du bronze); ce sont des  pinces à épiler rudimentaires,  retrouvées en grand nombre  dans des sépultures de cette période, avec des objets de toilette, fibules, épingles, cuillères à fard, les duvets disgracieux étaient aussi brûlés à la flamme.
Les hommes préhistoriques pratiquaient probablement la peinture corporelle, première parure.

  1.6 REPRESENTATIONS DANS L’ART

  Les corps féminins sont opulents, aux caractères sexuels secondaires affichés
  Les premières  statuettes féminines préhistorique appelées vénus (250 retrouvées), datant du paléolithique supérieur, montrent des femmes girondes à la poitrine et à l’abdomen développDame de Brassempouyé, les plus célèbres sont celles  de Willendorf, de Laussel, de Lespugue, de Gagrino, sculptées dans l’ivoire ou l’os. Il s’agirait d’idoles de fécondité, associant directement nourriture et capacité reproductive. Le goût des femmes plantureuses existe chez de nombreux peuples primitifs, associé à la survie de l’espèce, on peut toutefois se demander si cela ne correspondait pas à des modèles vivants de l’époque.

L’ unique  représentation de visage connu de cette époque est la « Dame de Brassempouy », petite figurine en os de 3 cm datant du paléolithique supérieur : arcade sourcilières fine, un nez, un menton bien en relief, profil fin, tête et cou recouverts de lignes croisées, correspondant à une chevelure tressée
                                                         
1-Dame de Brassempouy - Musée  des Antiquités Nationales de. St Germain en Laye